Invocabilité des dispositions sur le harcèlement moral par le salarié dispensé d’activité

Actualité
05/07/2019

Les dispositions relatives au harcèlement moral sont applicables pendant toute la durée de la relation salariale, peu important que le salarié soit dispensé d’activité.

Après avoir été mis à la retraite le 1er octobre 2012, un salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes. Avant cela il a bénéficié, à compter du 31 décembre 2006, d'un congé de fin de carrière avec cessation d'activité. Et l’intéressé a exercé divers mandats représentatifs à compter de 2009.

En appel sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral a été jugée irrecevable, les juges retenant qu’elle était prescrite s'agissant des faits remontant avant le 9 juillet 2009. Surtout, pour la cour d’appel, le salarié, en congé de fin de carrière sans activité depuis le 31 décembre 2006, ne pouvait invoquer aucune dégradation de ses conditions de travail puisqu'il n'était plus sur son poste de travail au sein de l'entreprise. Dit autrement, n’exerçant plus aucun travail dans la société, les agissements allégués n'ont pas pu avoir pour effet ou pour objet une dégradation de ses conditions de travail.

La Cour de cassation n’a pas souscrit à ce raisonnement, mettant en avant, au contraire, que le salarié était demeuré lié à l'entreprise par un contrat de travail jusqu'à son départ en retraite le 1er octobre 2012. Les juges du fond auraient dû rechercher, comme il leur était demandé, si les agissements dénoncés par le salarié n’étaient pas constitutifs d’un harcèlement moral, certains étant postérieurs à son départ en congé de fin de carrière, tels que : le refus de fournir des outils nécessaires à son activité syndicale en le privant pendant deux ans d'un accès à l'intranet de l'entreprise ; le refus de lui permettre d'assister aux réunions de délégués du personnel par télé-présence après la reconnaissance de son état de travailleur handicapé ; des erreurs systématiques quant au calcul des cotisations de retraite complémentaire et supplémentaire ainsi que des erreurs quant au calcul de l'intéressement et de la participation. Selon la Cour, il s’agissait là de faits qui permettent de présumer un harcèlement moral entre le 9 juillet 2009 et le 1er octobre 2012. En refusant d’en tenir compte, la cour d’appel a violé l’article L. 1152-1 du Code du travail selon lequel « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».

Sources : Cassation sociale, 26 juin 2019, n° 17-28.328, FS-P+B

 

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