Jurisprudence - Condamnation d'un site hébergeur de prestations de GPA

Actualité
22/10/2020

Dans un arrêt du 13 octobre 2020, la cour d'appel de Versailles condamne la société OVH, en sa qualité d'hébergeur, à rendre inaccessible sur le territoire français un site proposant aux Français des prestations de mères porteuses.

L'Association des Juristes pour l'enfance avait mis en demeure la société OVH - hébergeur de sites -, de retirer sans délai le contenu du site internet de la société de droit espagnol Subrogalia S.L afin qu'il ne soit plus accessible sur le territoire français en application des dispositions de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN).

La société OVH est condamnée en première instance par le TGI de Versailles. La cour d'appel confirme le jugement en toutes ses dispositions.

La cour d'appel, après avoir examiné le caractère illicite du contenu du site, estime que l'hébergeur engage sa responsabilité en ne retirant pas promptement ce contenu alors qu'il a été mis en demeure de le faire, conformément aux dispositions de l'article 6.I.2 de LCEN.

Le caractère illicite du site est établi par le fait que la prestation proposée par le site est bien une prestation d'entremise « entre une personne ou un couple désireux d'accueillir un enfant et une femme acceptant de porter en elle cet enfant en vue de le leur remettre » (faits réprimés par C. pén., art. 227-12) ; le caractère habituel de l'entremise est établi par le nombre de clients revendiqués, le caractère lucratif n'étant pas davantage contestable (« packs qui ont un prix fixe »). La Cour relève en outre que le site est destiné à un public situé en France où la GPA est illicite et l'entremise interdite. Elle en déduit ainsi que le site est illicite en France.

Ensuite, la Cour se prononce sur la responsabilité de la société OVH, hébergeur. Si la loi de 2004 pose un principe d'irresponsabilité de l'hébergeur quant au contenu des sites hébergés, cette irresponsabilité s'efface lorsqu'il a connaissance de l'activité ou de l'information illicite et qu'il n'agit pas pour retirer ces informations ou en rendre l'accès impossible. La connaissance des faits litigieux est présumée acquise par l'hébergeur lorsqu'il reçoit notification de différents éléments énumérés par la loi (LCEN, art. 6.I.5). Le Conseil constitutionnel a précisé que la responsabilité de l'hébergeur ne peut être engagée si l'information dénoncée comme illicite ne présente pas « manifestement » un tel caractère (Cons. const., 10 juin 2004, n° 2004-496 DC).

La Cour établit que le caractère « manifestement illicite » du site s'apprécie par rapport à la loi française et non à celle du lieu de résidence de l'éditeur du site, la loi se référant aux contenus et non à leur émission, et qu'il ne peut être que la conséquence d'un manquement délibéré à une disposition de droit positif explicite et dénuée d'ambiguïté.

Les juges relèvent en l'espèce que « le contenu du site était à l'évidence « manifestement illicite » en ce qu'il contrevenait explicitement aux dispositions de droit français – dépourvues d'ambiguïté – prohibant la gestation pour autrui ». « Il incombait donc à la société OVH d'agir promptement ».

La responsabilité de l'hébergeur est donc retenue.

Sources : Lexis-Nexis

 

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