Jurisprudence - Incidence d’une demande d'AJ sur les délais de la procédure d’appel

Actualité
02/04/2020

Dans deux arrêts, en date du 19 mars 2020, la Cour de cassation se prononce sur l’incidence d’une demande d’aide juridictionnelle sur la déclaration d’appel.

Dans ces deux affaires, malgré l’incertitude qui entourait l’état du droit issu du décret du 27 décembre 2016 portant diverses dispositions relatives à l'aide juridique (D. n° n° 2016-1876, 27 déc. 2016), les cours d’appel, estimant que les délais de la procédure d’appel n’étaient plus interrompus par une demande d’aide juridictionnelle, avaient prononcé la caducité de déclarations d’appel formées dans le délai d’appel, par des appelants qui, à la suite immédiate de leur déclaration d’appel, avaient sollicité le bénéfice de cette aide, puis conclu dans les 3 mois des décisions qui leur en avaient octroyé le bénéfice.

La Cour de cassation censure ces arrêts en indiquant :

  • d’une part, qu’il résulte de l’article 6 § 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (Conv. EDH) que le principe de sécurité juridique implique que de nouvelles règles, prises dans leur ensemble, soient accessibles et prévisibles et n’affectent pas le droit à l’accès effectif au juge, dans sa substance même.
  • d’autre part que, le dispositif mis en place par le décret du 27 décembre 2016 porte atteinte au principe de sécurité juridique, en ce qu'il abroge l’article 38-1 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 (D. n° 91-1266, 19 déc. 1991, art. 38-1). Cet article prévoyait, dans le cas particulier d’une procédure d’appel, l’interruption des délais réglementaires que cette procédure fait courir. Cette abrogation a créé une situation d’incertitude juridique, entraînant une confusion, encore accrue par la publication de la circulaire d’application du décret du 27 décembre 2016, bien que celle-ci soit, par nature, dépourvue de portée normative. Il avait pour effet de restreindre, de manière disproportionnée au regard des objectifs de célérité et de bonne administration de la justice que ce texte poursuivait, le droit d’accès effectif au juge des requérants qui sollicitent l’aide juridictionnelle après avoir formé une déclaration d’appel.

En conséquence l’appelant qui avait formé appel avant le 11 mai 2017, date d’entrée en vigueur du décret du 6 mai 2017 qui rétablissait, au moins pour partie, l’ancien dispositif prévoyant l’interruption des délais de la procédure d’appel, et sollicité, dans le délai prévu par l’article 908 du Code de procédure civile, le bénéfice de l’aide juridictionnelle, puis remis au greffe ses conclusions dans ce même délai, courant à compter de la notification de la décision statuant définitivement sur cette aide, ne pouvait se voir opposer la caducité de sa déclaration d’appel.

Sources : Cass. 2e civ., 19 mars 2020, n° 18-23.923, FS-P+B+I ; Cass. 2e civ., 19 mars 2020, n° 19-12.990, FS-P+B+I

 

À lire aussi