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14/04/2021

Ordonnance de 1945 : le mineur entendu par la PJJ à l'occasion d'une procédure judiciaire doit être informé de son droit de se taire

Le Conseil constitutionnel, dans une décision du 9 avril 2021, déclare contraire à la Constitution les dispositions de l'article 12 de l'ordonnance de 1945. Il reproche à ce texte de ne pas prévoir que le mineur, objet d'une information judiciaire et entendu sur les faits par les services de la PJJ, soit préalablement informé de son droit de garder le silence. Le législateur a jusqu'au 30 septembre 2021 pour agir.

Le service de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) établit, à la demande du procureur de la République, du juge des enfants ou de la juridiction d'instruction, un rapport contenant tous renseignements utiles sur la situation du mineur ainsi qu'une proposition éducative. Ce service est notamment consulté avant toute réquisition ou décision de placement en détention provisoire ou de prolongation de la détention provisoire du mineur ainsi qu'avant toute décision du juge des enfants ou du tribunal pour enfants dans certains cas où ils sont saisis aux fins de jugement.

L'agent compétent de la PJJ chargé de réaliser ce rapport peut interroger le mineur sur les faits qui lui sont reprochés. Le mineur peut ainsi être amené à reconnaître sa culpabilité dans le cadre du recueil de renseignements socio-éducatifs. Or, certes l'objectif principal du rapport établi à la suite de cet entretien est d'éclairer le magistrat ou la juridiction sur l'opportunité d'une réponse éducative. Mais les déclarations du mineur recueillies dans ce cadre sont susceptibles d'être portées à la connaissance de la juridiction de jugement lorsqu'elles sont consignées dans le rapport joint à la procédure.

Dès lors, en ne prévoyant pas que le mineur entendu par la PJJ doit être informé de son droit de se taire, les dispositions de l'article 12 de l'ordonnance de 1945 portent atteinte à ce droit. En effet, rappelle le Conseil, selon l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi ». Il en résulte le principe selon lequel nul n'est tenu de s'accuser, dont découle le droit de se taire. Le Conseil constitutionnel les déclare donc inconstitutionnelles.

Cette décision s'inscrit dans un courant qui vise à faire reconnaître le droit au silence de l'accusé à tout moment de la procédure lorsqu'il est susceptible de reconnaître les faits qui lui sont reprochés (Cons. const., 4 mars 2021, n° 2020-886 QPC). Dans une décision du vendredi 9 avril 2021, le Conseil constitutionnel a également censuré les dispositions du Code de procédure pénale qui définissent les règles de procédures applicables aux audiences devant la chambre de l'instruction leur reprochant de ne pas prévoir l'obligation pour le juge d'informer le mis en examen de son droit de se taire (Cons. const., 9 avr. 2021, n° 2021-895/901/902/903 QPC ; contra Cass. crim., 24 mars 2021, n° 21-81.361, F-P).

Sur les effets de l'inconstitutionnalité. Le Conseil relève que l'abrogation immédiate de ces dispositions supprimerait la possibilité pour l'autorité judiciaire de faire procéder à un recueil de renseignements socio-éducatifs. Elle entraînerait donc des conséquences manifestement excessives. Il reporte donc au 30 septembre 2021 la date de leur abrogation. Les mesures prises avant la publication de la décision ne peuvent être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité. En revanche, afin de faire cesser l'inconstitutionnalité, jusqu'à la date de l'abrogation des dispositions, le service de la PJJ doit informer le mineur avec lequel il s'entretient de son droit de se taire.

Pour rappel, cette disposition a été abrogée par l'ordonnance de 2019 portant partie législative du Code de justice pénale des mineurs (Ord. n° 2019-950, 11 sept. 2019) qui entrera en vigueur le 30 septembre prochain. Cette disposition est désormais prévue à l'article L.322-7 du CJPM qui dispose que « La mesure judiciaire d'investigation éducative consiste en une évaluation approfondie et interdisciplinaire de la personnalité et de la situation du mineur, y compris, le cas échéant, sur le plan médical.

Elle peut être ordonnée par le juge des enfants, le juge d'instruction et les juridictions de jugement pour mineurs à tous les stades de la procédure pénale.

Elle peut être mise en œuvre par les services et établissements de la protection judiciaire de la jeunesse ou du secteur associatif habilité.

Elle donne lieu à un rapport contenant tous renseignements utiles sur sa situation ainsi qu'une proposition éducative ou une proposition de mesures propres à favoriser son insertion sociale. »

Sources Lexis-Nexis

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